La tempête Zeus a arrêté certains venant de loin, mais 16 personnes l’ont bravée pour écouter la suite de l’exposé de Gaëtan Autuoro sur les Intoxications par les champignons.
Sur la couverture de ce deuxième polycop, on peut admirer 2 très belles photos d’Alain Petitjean : Chlorophyllum rhacodes var. bohemica et Amanita verna var. decipiens.
Comme pour l’exposé du mois dernier, je ne rapporterai ici que les réponses aux questions posées et les remarques des participants. Pour ceux qui n’ont pu venir et qui voudraient acquérir les 2 polycops, ils sont disponibles au local de la SNAA, contre une petite participation (2 X 3 €).
Les diverses intoxications, au nombre de 21, sont passées en revue.
Première intervention pour l’intoxication de type « muscarinien » (N° 3 de la liste) causée par divers Clitocybes blancs, des Inocybes ou encore des Mycènes du groupe pura : « quelle action a l’atropine citée comme antidote ? ». Je rappelle en avoir déjà parlé dans le document sur « Le Meunier et champignons lui ressemblants ». En résumé, l’atropine a une action inverse de la muscarine, (contenue dans ces champignons), la muscarine étant un vagomimétique (hypersecrétion sudorale, nasale, lacrymale, myosis, bradycardie etc….).
Intoxication hémolytique (N°7) : Beaucoup de champignons étant considérés comestibles crus jusqu’à présent, même le Cèpe de Bordeaux décliné parfois en carpaccio, de même l’Amanite des Césars, sont maintenant à éviter crus et pour d’autres, il faut vraiment bien les cuire (Amanita rubescens).
Syndrome paxillien (N°8) : Paxillus involutus et voisins, étaient souvent cités comme mortels seulement crus, mais l’on considère dorénavant qu’ils sont mortels cuits aussi.
Syndrome phalloidien (N°9) : L’Amanite phalloide est sans aucun doute le champignon qui cause le plus grand nombre d’intoxication, souvent dues à des confusions (même avec des Lépiotes dans l’Ain !!), et également celui qui totalise le plus de décès. La dose létale est d’environ 30 gr d’un chapeau. On remarque aussi que le nombre d’intoxication est inversement proportionnel à la pousse des champignons, comme si le ramasseur voulait à tout prix avoir de quoi se faire un plat malgré la rareté des champignons….
Gaëtan commente ensuite un dossier très complet sur les différentes amanites mortelles (tableaux avec 16 espèces) et un autre comparant Galerina marginata (même type d’intoxication mortelle) avec Kuehneromyces mutabilis, quelquefois appelé Agaric à soupe, donc comestible. Les espagnols les conservent dans l’huile.
Pour distinguer l’espèce phalloïdes de sa variété alba, il faut regarder l’anneau : partie supérieure striée pour A. phalloïdes alors qu’il est lisse non strié pour la variété alba.
Dans les Amanita verna, on note que la variété decipiens est la plus fréquente, et qu’elle peut pousser de mai à septembre.
Pour les Amanita virosa, c’est la variété levipes la plus fréquente. En Europe du Sud, l’espèce Amanita porrinensis est caractéristique avec son mamelon blanc en forme de chapeau mexicain.
Pour l’intoxication amplement détaillée, on retiendra en conclusion que chaque pays a son protocole de soins. Seul 3 traitements sont reconnus comme ayant une efficacité : la pénicilline G, la sylimarine et la N-acétylcysteine. Cette trithérapie, même si ce n’est pas l’antidote, a tout de même fait baisser la mortalité à 10 %. Nous sommes loin des traitements anciens comme la sérothérapie (injection d’extrait de phalloide à un cheval), l’organothérapie (ingestion de cervelles et d’estomacs de lapin broyés et crus !) ou même du traitement du Dr Bastien, qui prenait son traitement avant même de manger ses amanites.
Syndrome orellanien (N° 10) : Les Cortinarius semi sanguineus sont souvent ramassés avec les Chanterelles en tube.
Syndrome acromélalgien (N°16) : causé par Clitocybe amoenolens chez nous. Il ressemble beaucoup à des pleurotes d’où le danger, d’autant qu’il provoque des douleurs horribles qui peuvent être calmées dans l’eau froide à condition de n’y pas rester trop longtemps, car il y a risque de gangrène. Les douleurs disparaissent progressivement en 2 à 3 ans. On peut le reconnaître à son odeur forte de corydaline, il peut être aussi gros que Clitocybe gibba ou ressembler à Lepista inversa. Gaëtan nous invite à le photographier et à signaler sa station si par hasard nous le trouvons. Nous aurons un exposé plus complet lors d’une prochaine séance.
Syndrome cérébelleux (N° 17) : concerne surtout les Morilles et apparentés. En fait, on peut retrouver aussi les Morilles dans le syndrome le plus courant (résinoide, N° 2), du moins après 5 à 6 h, le syndrome cérébelleux n’apparaissant qu’au bout de 12 h. En tout cas, il faut bien les cuire, même réhydratées : compter au moins 20 minutes à plus de 60° (dixit Jean-Claude Rabatel).
N° 18 et N° 19 : Dermatose à zébrures due au Shiitaké et syndrome de Szechwan (risques hémorragiques) dû à Auricularia auricula-judae, les fameux champignons noirs : ces champignons surtout utilisés en Asie dans de nombreux plats, soupes etc… ont une toxicité difficile à évaluer d’autant que ces mêmes pays les utilisent aussi dans leur pharmacopée !
N° 20 : Mycose pulmonaire, pneumonie et bien d’autres symptômes dus à Schyzophyllum commune. Danger extrême pour les bucherons, mais pas qu’eux….Pour ce champignon aussi, Gaëtan a fait un dossier complet, non seulement sur le côté pathogène mais aussi sur ses vertus thérapeutiques étudiées et utilisées au Japon ou Malaisie, comme son action sur des cellules cancéreuses, les effets antioxydants, l’activité antibactérienne. Mais en ce qui nous concerne, gardons à l’esprit qu’il vaut mieux ne pas le toucher et surtout le respirer. D’ailleurs les exemplaires que nous faisons passer sont coincés entre deux couvercles plastiques.
Ailleurs que chez nous (Suisse, Allemagne), André Delarue nous signale que certains champignons sont utilisés dans le traitement de cancer du foie. Exemple de Ganoderma lucidum + Coriolus versicolor indiqués en prévention de maladies virales chroniques protumorales (ouvrage de Jean-Marie Samori Les champignons comestibles aliments d’avenir).
N° 21 Tous les autres toxiques. Parmi eux, Lyophyllum connatum. Sur les 40 espèces de Lyophyllum, une seule est toxique. La lyophylline qu’il contient affecterait le développement embryonnaire des souris. Quant à Megacollybia plathyphylla, elle est citée comme donnant des troubles gastro-intestinaux, voire des occlusions.
D’un commun accord, la soirée étant bien avancée, nous décidons de reporter la suite des intoxications (Lépiotes toxiques, Paxilles, Clitocybe amoenolens) à une prochaine séance, sans doute le 15 mai, puisque pour le 10 avril, nous avons déjà un sujet prévu sur la nature des sols, avec Pascal Mathieu.