Pour cette première séance de l’année 2016, nous étions une vingtaine. La soirée s’est divisée en 3 parties : présentation et tour de table pour récolter diverses remarques ou suggestions, exposé sur les noms vernaculaires en Mycologie et enfin détermination des différents champignons ramassés en cette fin de mois de janvier, exceptionnellement douce.
Avis des participants :
- Pas mal de « novices » dans la détermination n’apprécient pas beaucoup le fascicule « A la découverte des champignons », et rencontrent de toutes façons des difficultés à utiliser les clés de détermination des différents ouvrages : Bon, Courtecuisse, Eyssartier etc…. Exception pour ceux qui ont suivi le cours « débutant » avec Arlette Froment qui a su, en bonne enseignante, leur apprendre à se servir du petit fascicule. Les autres préfèrent leur premier Guide ou les tableaux très clairs, illustrés de dessins, qu’avait fait Danièle Bouveret d’après plusieurs guides (surtout Hurtado). Suite à toutes ces remarques, nous avons donc décidé de consacrer le prochain Lundi du Champignon (21 mars) à ce problème. Jean-Claude Rabatel représentera « A la découverte des Champignons » et donnera des indications pour l’utilisation de toutes les autres clés de détermination.
- Toujours au sujet de l’Ecole du Champignon, une personne souhaiterait que nous les proposions à la détermination en les classant par famille. Mais ce serait faciliter la détermination, ce qui n’est pas le but de nos soirées !
- Par contre, nous essaierons, comme Jean-Claude Rabatel le demande, d’en mettre moins à déterminer, sur la grande table. Il vaut mieux en effet n’en voir que 5 ou 6, bien les identifier et ainsi bien s’en rappeler. Cela n’empêchera pas, à la fin, de venir voir dans la salle des déterminateurs le champignon que l’on a apporté et tous les autres, qui auront quand même été déterminés par nos soins.
- Parmi les sujets souhaités, on retrouve surtout les études par famille. Et pour cette année, nous retenons dans l’ordre : les Bolets (Gaëtan Autuoro veut bien s’y « coller »), les Amanites toujours très demandées (il existe déjà pas mal de documents au local qui peuvent resservir à présenter le thème), les Lépiotes, les Pézizes (David Drencourt) etc…
- Un autre sujet a été retenu : Pascal Mathieu nous parlera de la nature des sols et de leur influence sur la pousse de tel ou tel champignon.
- Jean Pereire aimerait bien savoir comment on cuisine les champignons. Nous avons traité les différents modes de conservation l’année dernière mais pour les cuisiner, cela déborde un peu les objectifs de notre association…..
- Certains trouvent la formation trop courte, mais comme le fait remarquer gentiment Arlette, il n’est pas interdit de redoubler, d’ailleurs certains ne s’en privent pas.
- Dans l’ensemble, les sorties sont très appréciées, rien ne vaut en effet l’étude sur le terrain.
- Pour ce qui concerne les récoltes de cette année, peu en ont eu de mémorable, du moins dans l’Ain et en plaine, la faute à la sécheresse mais aussi au vent. Gaëtan qui va souvent dans d’autres départements, Saône et Loire et Haute Ardèche par exemple, en a trouvé pas mal (200 espèces), de même Guillaume Schub à Chatillon La Palud, mais là il s’agirait plutôt d’une plaque suite à des conditions climatiques particulières. C’est d’ailleurs l’occasion pour Gaëtan de nous parler de l’influence des lunes montantes et descendantes. Le sujet est toujours source de polémique, mais il se propose de nous le traiter à l’occasion.
Résumé des pousses :
- Très peu de morilles et Tricholomes de la St Georges au printemps.
- Début octobre, avec Alain Petitjean : un véritable champ de Langermania gigantea (d’ailleurs présentes à notre exposition ), et plusieurs sortes de bolets : Boletus legaliae, B. queletii ,B. satanas, B. fragans.
- Lors de toutes les soirées de l’Ecole du Champignon (début septembre à fin novembre), nous n’avons guère vu de girolle, trompette des morts, cèpe de Bordeaux et encore moins de Rosé des prés (voir l’article du Bilan que j’ai mis sur le site). Par contre, en janvier, on a trouvé des morilles (Jura) et beaucoup de Lepista nuda ou Pied bleu (voir les articles du Progrès). Et Danièle Bouveret a trouvé par exemple une Amanita crocea. D’ailleurs il y avait plus de champignons à déterminer à la soirée des vœux et ce lundi que lors des dernières séances de fin novembre.
EXPOSE SUR LES NOMS VERNACULAIRES EN MYCOLOGIE
Définition : mot dérivé du latin « vernaculus » signifiant « relatif aux esclaves nés dans la maison ». Le Français, au Moyen âge, le reprend comme adjectif, langue vernacule, qui désigne la langue familière parlée spontanément (au contraire du latin). De nos jours le mot vernaculaire ne s’applique plus qu’à ce qui est propre à un pays ou un lieu, que ce soit une langue, une maladie etc… Et par extension le nom vernaculaire s’ applique aux animaux, plantes ou champignons, par opposition au nom scientifique donné en latin.
Il faut quand même savoir qu’il existe depuis 1999 un« Comité pour les noms français des champignons », onze membres dont Régis Courtecuisse, pour diminuer le nombre des noms vernaculaires pour une espèce (42 pour Amanita Caesarea !), ou tout simplement donner un nom français à des espèces qui n’en n’avaient pas. Ils ne doivent en aucun cas se substituer aux noms latins, mais plutôt s’y associer, car ils peuvent être utiles ou nécessaires à des fins commerciales, pour les visiteurs d’expositions mycologiques, ou les diverses réglementations administratives (cueillettes, listes rouges, protection de biotopes etc….).
INCONVENIENTS :
C’est sans doute le nombre impressionnant de noms vernaculaires pour une seule espèce, variant d’une région à l’autre, et même pour des lieux différents, parfois voisins, qui est le plus gros inconvénient.
C’est François Reverchon de la Société Mycologique Migennoise qui a répertorié par exemple 68 noms vernaculaires pour Macrolepiota procera et pas moins de 51 noms pour Cantharellus cibarius
De plus un même nom vernaculaire peut quelquefois désigner plusieurs espèces, pour peu qu’il ait une origine ou cause identique : couleur, lieu, support ou moment de pousse ……car ils sont souvent une traduction populaire issue des traditions locales.
Pour des raisons commerciales, il a fallu changer le nom vernaculaire de « Trompette des morts », sans doute dû à sa couleur noire mais surtout parce que poussant à la Toussaint, en « Trompette des Maures », on devine facilement pourquoi. Craterellus cornucopioïdes peut s’appeler aussi Craterelle et Corne d’abondance, de par sa forme.
- Exemple de nom identique :
- Golmote à la fois pour Amanita rubescens et Macrolepiota procera.
- Petit gris pour Tricholoma terrum (ou Griset) et Clitocybe nebularis.
- Pratelle pour Agaricus campestris et Agaricus arvensis, respectivement Psalliote champêtre( rosé des prés) et Psalliote des jachères.
-Citons le cas de l’appellation « mousseron » utilisée en de multiples endroits pour des champignons très différents : Mousseron à farine (Clitopilus prunulus, le Meunier), Mousseron blanc( Leucopaxillus giganteus, Clitocybe géant), Mousseron d’automne (Marasmius oreades), Mousseron de la St Georges (Calocybe gambosa), Mousseron des haies (Entoloma clypeatum, Entolome en bouclier), sans compter le faux Mousseron (encore Marasmius oreades), et le Vrai Mousseron (encore Calocybe gambosa ou Tricholome de la St Georges).
Et de plus, beaucoup de noms français peuvent être créés par les auteurs et diffèrent d’un guide à l’autre.
- Quelques exemples de noms multiples :
- Macrolepiota procera : Coulemelle, Saint Michel, Baguette de tambour, Parasol (comme Coprinus comatus ), Couamelle, Nez de chat, Couleuvrée, Potiron, Golmote ( comme Amanita rubescens), Grisotte, Chevalier bagué, Demoiselle, Lépiote élevée …….
- Cantharellus cibarius : Girolle, Girondelle, Crête de coq, Gallinace, Chevrette, Jaunotte, Jaunette ou Roussotte….
- Hydnum repandum : Barbe de chèvre, Langue de chat, Langue de bouc, Pied de mouton, Langue de veau….
- Agaricus campestris : Agaric champêtre, Psalliote champêtre, Rosé des prés, Potiron (comme Macrolepiota procera !).
- Agaricus bisporus ou champignon de Paris : Portobello.
- Tricholoma équestre : Bidaou, Tricholome equestre, Jaunet (comme Entoloma lividum), Tricholome des Chevaliers, Cavalier.
AVANTAGES :
Les noms vernaculaires apportent une aide dans la mémorisation et la reconnaissance des champignons surtout au début de l’initiation car ils sont souvent le reflet de caractère particulier au champignon : aspect, ressemblance à un animal, couleur, habitat préféré, odeur, gout, support, date ou saison de pousse etc….
-Certains champignons portent le nom d’un Saint, parce qu’ils poussent à cette date, comme :
- Saint Georges (23 avril) : Tricholome de la St Georges ou Calocybe gambosa dit aussi Vrai Mousseron.
- Saint Michel (29 septembre) : Saint Michel, Coulemelle, Macrolepiota procera.
- Saint Martin (11 novembre) : Saint Martin, Tricholome terreux, Petit gris, Tricholoma terreum.
- pour la forme ou la ressemblance :
- Collybia fusipes = Collybie à pied en fuseau ou Souchette car elle a la forme d’un fuseau et qu’elle pousse sur des souches.
- Amanita vaginata : Amanite vaginée ou engainée, Coucoumelle.
- Mutinus caninus = Phallus du chien, Bite de chien.
- Agaricus arvensis : Bouchon de champagne, Boule de neige, Psalliote des jachères, Paturon blanc.
- Gyromitra esculenta = Cervelot, Fausse morille.
- Auricularia auricula-Judae = Oreille de Judas, Champignon chinois, Oreille d’arbre ou de sureau. D’après la légende, Judas se serait pendu à un sureau.
Beaucoup d’autres champignons ont un nom d’oreille : Oreille de chat pour Helvella crispa, Oreille de cochon pour Disciotis venosa (Pézize veinée), Oreille de lapin ou de veau pour Tremiscus helvelloides (Guépinie rousse), Oreille de l’olivier pour Omphalotus olearius (Pleurote de l’olivier, Clitocybe de l’olivier, Faux-clitocybe lumineux) ,Oreille de singe (encore la Pézize veinée), Oreille du chardon pour Pleurotus eryngii (Pleurote du panicaut). Et je vous fais grâce de tous ceux qui ont un nom « d’Oreillette » ! Bon nombre de noms vernaculaires commencent aussi par : Pied de ou Tête de……
- Ramaria bothrytis = Clavaire en chou fleur, Cheveline, Pied de coq
- Fistulina hepatica = Langue de bœuf, ou Fistuline hépatique, ressemblant à la fois à une langue de bœuf, bien rouge à l’intérieur, ou à un foie.
- Xylaria polymorpha = Doigt de Satan ou Doigt du mort.
- Sparassis crispa = Chou-fleur, Sparassis crêpu.
- Clathrus ruber = Coeur de sorcière, Clathre grillagé.
- Clavariadelphus pistillaris = Sucette des pauvres, Clavaire en pilon. Au début du XX siècle, dans l’Est de la France, une fois trempé dans l’eau sucrée, ce champignon servait de friandise aux enfants des familles modestes !!
- pour le lieu de pousse :
- Agaricus silvicola = Agaric ou Psalliote des bois ou A. silvaticus pour Psalliote des forêts.
- Boletus edulis = Cèpe de Bordeaux, Cèpe comestible.
- Marasmius oreades = Marasme montagnard, Nymphe des montagnes, Marasme d’oréade (les oréades en grec, étaient les nymphes des montagnes), plus communément connu ici sous le nom de Faux mousseron mais aussi Bouton de guêtre, Bouton de culotte ou encore Secadou.
- pour le gout :
-Lactarius piperatus = Lactaire poivré, Auburon, Poivrette.
-Lactarius pyrogalus = Lactaire caustique, Lactaire à lait brûlant.
- pour l’odeur :
- Cortinarius traganus = Cortinaire à odeur de bouc, Cortinaire puant.
- Clitopilus prunulus = Meunier, Clitopile petite prune, Mousseron à farine à forte odeur également appelé Langue de carpe.
- Lactarius glyciosmus = Lactaire coco, lactaire odorant, lactaire parfumé.
- pour la couleur :
- Boletus aereus = Cèpe bronzé, Bolet bronzé, Tête de nègre.
- Hygrophorampsis aurantiaca = Chanterelle orangée, Fausse Chanterelle et Fausse girolle.
- Coprinus atramentarius = Coprin noir d’encre, Coprin encrier, Coprin goutte d’encre.
- Gyroporus cyanescens = Indigotier (les feuilles d’un arbre de la famille des Fabacées servaient à teindre les vêtements), Bolet bleuissant.
- pour l’association à un nom de personnage :
- Amanita Caesarea = Amanite des Césars, Oronge, Oronge vraie, Cocon, Jasseran, Jaune d’Oeuf.
- Inocybe Patouillardii = Inocybe de Patouillard provenant de Narcisse Théophile Patouillard, pharmacien et mycologue (1854-1926), également appelé Inocybe de printemps.
- pour la saison de pousse :
- Entoloma clypeatum = Entolome de printemps, Entolome en bouclier. Mais Entoloma sepium peut aussi s’appeler Entolome de printemps, et Entolome des haies.
- Hygrophorus marzuolus = Hygrophore de Mars, Hygrophore dormeur, parce que difficile à ramasser, bien enterré.
- pour son action :
- Lactarius torminosus = Lactaire aux coliques, Lactaire toisonné, lactaire à toison, lactaire aux tranchées.
- Fomes fomentaria : Polypore à feu, Polypore des pharmacies, Polypore amadouvier (les artistes de Lascaux s’en servaient pour allumer le feu).
- Volvariella gloïocephala : Morveux, Volvaire gluante.
- Beaucoup de lactaires à lait abondant ont un nom vernaculaire comme Vache (Lactarius volemus), Vache blanche (Lactarius piperatus), Vache rouge (Lactarius deliciosus), Vachette ou Vachotte pour encore Lactarius volemus, ou même Viau.
Nous pourrions citer des tas d’autres exemples. Vous en trouverez d’autres, rangés par ordre alphabétique des noms vernaculaires communs, sur le blog « Champignons Passion » .
En conclusion, même si tous ces noms vernaculaires sentent bon le terroir et nos traditions régionales et même s’ils nous aident à les mémoriser visuellement, leur multiplicité nous oblige à nous familiariser dès le début de l’apprentissage de la mycologie aux noms scientifiques latins.
Identification des champignons apportés :
Presque tous les champignons ont été amenés par David Drencourt et proviennent de la Cascade ou du terrain de foot de Ceyzeriat. Pour certains, il les a même photographiés in situ.
Nous avions : Tremella aurantia (gélatineux et jaune pour cette fois), Psathyrella piluliformis, en touffes, Auricularia auricula-judae, sorte d’oreille gélatineuse noire (champignon noir des plats asiatiques), Stereum hirsutum, Chlorociboria aeruginosa, Sarcocypha coccinea, toute une assiette de Tricholoma scalpturatum, et un énorme (50 cm) Ganoderma applanatum (que Gaëtan va se charger de conserver en vue des prochaines expositions).
De son côté, Arlette nous a amené (de ses montagnes….) un très gros Lepista panaeolus ou Lepista luscina connu ici sous le nom d’Argouane et qui est cousin du Pied bleu (Lepista nuda). C’est un bon comestible, poussant en troupe et en cercle, et qui, s’il est sec (pas le cas de celui ci qui était très humide), présente des taches genre fossettes plus sombres sur un fond beige uni. Je vous mets d’ailleurs une autre photo où il correspond mieux à sa définition.
Mais l’ennui, toujours en rapport au nom vernaculaire, c’est qu’un autre champignon peut aussi être appelé Argouane. Il s’agit de Pleurotus eryngii, le Pleurote du Panicaut, également comestible et connu sous le nom de Bérigoule ou Girboulot. Ce champignon se greffe sur des racines de Panicaut (Eryngium), sorte de chardon.
Je n’ai malheureusement pas trouvé l’origine de leur dénomination commune d’Argouane avec 1 n ou 2 n…..Si quelqu’un peut me renseigner ?