Sérendipité : l’art de trouver ce que l’on ne cherche pas en cherchant ce que l’on ne trouve pas. — (Philippe Quéau)
31 mai 2011, il est 20h10 et je rentre de Chambéry sous un fin crachin émanant de bancs de nuages qui arasent les flancs de la cluse des Hôpitaux.
J’ai choisi de rentrer par là car la semaine précédente, j’avais aperçu quelques hampes florales, trop rapidement pour savoir si c’était Anthericum liliago ou, plus improbable, des Asphodèles…
J’ai aussi trainé à Chamnord, près d’un vendeur de charcuteries catalanes, à la recherche de sobresades promises l’avant-veille, un clin d’œil à mon ami Daniel qui en raffolait, et d’un autre vendeur de mini hélicoptères armés de caméra…
Le temps s’était donc étiré mollement et à l’approche de la zone, entre Rossillon et la Burbanche, ma conduite s’était faite plus calme… Quelques fleurs blanches, et je vise une entrée de chemin qui me permet de me garer… Il ne fait pas plus de 9°C, le ciel est plombé et le crachin me transporte quelques instants en Écosse !
Flute ! Les fleurs ne sont que des Silènes, j’avais donc mal vu ! Je continue à remonter un peu la route, côté nord, jusqu’au PK33 et j’aperçois, fourrageant sur le bas côté, à deux pas de la route, une forme animale, brunâtre, lente… Un lièvre blessé ? Un renard fauché par une auto ? Je m’approche…
La bête ne me voit pas, la bête ne m’entend pas… Le pelage est plus gris que fauve à la réflexion, et le masque noir me laisse interdit : un blaireau, ou une blairelle (Meles meles L. 1758)… Je m’approche encore (flute ! pas d’appareil photo)… Je pourrais le prendre, mes pieds sont à quelques centimètres de lui, mais ça y est ! Je suis repéré ! Deux grognements mous et sourds, et le tasson s’enfile dans les herbes, dodelinant, d’un pas peu pressé… Il s’arrête, peut-être fait-il un debriefing de la situation ! Il y a une dépression herbeuse entre le talus et la pente d’éboulis, une sorte de prairie d’herbes folles… Mon pataud se remet en route, calmement, flairant de droite et de gauche, s’arrêtant devant une proie potentielle… puis, tout aussi calmement, il entame la montée de l’éboulis avec la célérité d’un grimpeur amateur dans les lacets de l’Alpe-d’Huez… Son cheminement créé des esses, je profite de lui, je vois ses muscles onduler sous sa toison, je crois percevoir un éclat dans son œil… Il n’avait vraisemblablement pas envie que l’on fasse plus ample connaissance, mais il n’était pas farouche pour autant…
Formule : déménagement de salle des profs au lycée + sobresade et hélicoptères à Chamnord + Asphodèles potentiels = rencontre improbable et moments inoubliables…
PS. Reprenant la route, je croiserai un peu plus loin les quelques hampes florales ponctuées d’étoiles blanches aperçues la semaine dernière… C’est juste à l’entrée de la carrière de groizes avant d’entrer dans la Burbanche, et il s’agit d’Anthericum liliago…